En France, 34 % des habitants se plaignent de l’acoustique de leur logement¹. Le bruit perturbe le sommeil, altère la concentration et nuit à la santé de manière générale. C’est un véritable enjeu de société : le coût annuel des nuisances sonores est estimé à plus de 147 milliards d’euros².
Imaginez : après une longue journée de travail, vous vous installez enfin dans votre canapé avec un bon livre. À peine quelques lignes lues, un bruit sourd retentit au-dessus de vous. Puis un autre. Et encore un autre. Des bruits de pas lourds, des chaises qu’on traîne, des objets qui tombent… Chaque son résonne à travers le plafond, impossible de se concentrer, encore moins de se détendre…
Parmi les différentes sources de nuisances sonores, le bruit d’impact entre logements – qu’il s’agisse de pas, de chutes d’objets ou de meubles déplacés – est l’un des problèmes les plus courants et les plus redoutés lors de l’achat d’un appartement, qu’il soit neuf ou rénové. Véritable fléau pour les habitants, il mérite une attention particulière afin d’améliorer le confort de vie au quotidien.
Dans un logement, nous sommes exposés à différents types de bruits, qui ont des origines variées, principalement aériennes et solidiennes.
On comprend donc que la nature du plancher joue un rôle clé dans l’intensité du bruit perçu dans les pièces situées en dessous. D’ailleurs l’isolation du plancher doit aussi prendre en compte les transmissions latérales, qui ne passent pas directement par le plancher mais qui sont transmises par les murs ou d’autres parois du logement. En effet, les transmissions latérales jouent un rôle d’amplificateur des nuisances sonores.
Une force est générée à chaque impact sur un plancher. Cette force dépend de plusieurs facteurs : la masse et la vitesse de l’objet qui tombe, ainsi que la nature de la surface d’impact.
La force générée provoque des vibrations dont l’intensité varie en fonction des caractéristiques du plancher. Plus le plancher est léger et rigide, plus les vibrations peuvent être importantes.
Ensuite, ces vibrations se propagent à travers la structure du matériau et, au contact de l’air, elles se transforment en ondes acoustiques : c’est ce qu’on appelle le rayonnement sonore du plancher. Ce phénomène influence directement le niveau sonore perçu dans la pièce située en dessous, en fonction de ses dimensions et des matériaux absorbants qui y sont présents.
Pour mesurer la gêne dans un logement ou pour tester un produit pendant la phase de R&D, il est possible de mesurer la performance d’un système au bruit d’impact. Cette mesure est effectuée en laboratoire (ISO 140) ou en conditions réelles
Le principe de la mesure est de positionner une machine à choc qui est un appareil normalisé, avec masselots de 500g tombant d’une hauteur de 40mm à une fréquence de 10Hz.
Machine à choc – Mesure du bruit d’impact
La machine à choc est positionnée sur le plancher. Des microphones sont placés dans la salle inférieure. Le spectre du niveau sonore mesuré permet de qualifier le niveau de bruit d’impact normalisé (pondéré par le temps de réverbération de la pièce).
En laboratoire, il est possible aussi de réaliser une mesure avec et sans le revêtement à tester. Ainsi, en faisant la différence du plancher “nu” et du plancher avec revêtement, on calcule le delta de bruit.
Les indices de mesure utilisés pour le calcul du bruit d’impact sont, d’après les normes ISO 717-2 :
Ces indices donnent une idée rapide de la performance du plancher, qui est la différence de performance entre le plancher nu et le plancher avec revêtement. La performance souvent recherchée est le ΔLw qui est typiquement entre 15dB et 25dB de réduction du bruit d’impact.
Attention cependant, il y a une subtilité dans ces indices ! Ils ne se lisent pas de la même façon.
Astuce : quand le “w” est affiché, c’est un indice global, sinon c’est un spectre (de 100Hz à 5000Hz)
Il existe deux principales solutions pour réduire le bruit d’impact. : les sols souples et les systèmes masse-ressort.
La première consiste à utiliser des revêtements souples (moquette, sol PVC,…). Techniquement, ces produits vont limiter la force qui est transmise au plancher et par conséquent limiter la propagation des vibrations. D’un point de vue fréquentielle, ce type de produit aura une efficacité à partir d’une certaine fréquence dépendant des caractéristiques du matériaux. On le voit sur le graphique ci dessous, avec une isolation qui augmente à partir de 315Hz.
sol souple
Isolation au bruit d’impact d’un revêtement souple
La seconde solution consiste à créer un système masse-ressort. Concrètement, un matériau souple, (ressort), est positionné sous une masse (une chape, un plancher bois).
Système Masse – Ressort, la masse étant la chape et le ressort le matériau résilient (SCAM, isolant)
Ce “masse-ressort” fait office d’un filtre fréquentiel qui permet de réduire les vibrations à partir d’une certaine fréquence.
Cette fréquence va dépendre :
Les “ressorts” les plus connus sont les sous-couches acoustiques minces (appelés SCAM). Des fabricants tels que SOPREMA, SIPLAST ou ISOVER en proposent plusieurs suivant la performance d’isolation souhaitée. Ces sous couches peuvent être aussi positionnées sous les sols souples pour améliorer la performance.
Il existe aussi des matériaux alliant thermique et acoustique tels que les isolants en polystyrène, laines de verres ou en fibre de bois. Ces matériaux ont, suivant leur épaisseur et leur raideur dynamique, un impact sur la performance complète du plancher. Nous pouvons citer quelques fabricants : STEICO, KNAUF et PLACO.
Du coté de la masse, la chape a aussi une incidence sur la performance. Plus sa masse est élevée, plus le système masse-ressort sera efficace contre les bruits d’impact (diminution de la fréquence de résonance).
De plus en plus de solutions avec des chapes sèches (à poser) sont développées notamment dans la construction bois ou en rénovation, avec des performances intéressantes. Ces solutions intègrent souvent une sous-couche jouant aussi le rôle de ressort.
Lorsqu’il s’agit d’isolation acoustique sous chape (SCAM ou autres isolants), les fabricants cherchent à optimiser la raideur dynamique des matériaux afin d’obtenir de meilleures performances. La raideur dynamique correspond à un indice de rigidité du matériau et joue un rôle clé dans l’efficacité de l’isolation au bruit d’impact.
La raideur dynamique détermine la fréquence de résonance du système “chape + isolant” :
En résumé :
Dans le diagramme ci-dessous, on observe que :
Mieux vaut vivre dans un immeuble équipé de sols ayant un indice global de réduction du bruit d’impact de ΔLw = 20dB !!
La raideur dynamique est donc un paramètre essentiel pour optimiser l’isolation au bruit d’impact. La mesurer permet aux fabricants de garantir que leurs produits répondent aux normes de performance.
Voici la formule du calcul de la raideur dynamique :
Le s’ est la raideur dynamique du matériau et ms est la masse surfacique de la chape
Avec l’essor des constructions à ossature légère – en bois ou en métal –, le bruit devient un enjeu majeur. Sans une conception soignée et un choix judicieux des matériaux, l’isolation acoustique peut vite devenir insuffisante.
Pourquoi ? Parce que l’isolation aux bruits d’impact dépend en grande partie de la masse du plancher. Or, sur une structure légère, les basses fréquences traversent plus facilement, rendant le confort acoustique plus difficile à garantir.
Pour limiter le changement climatique, la conception des bâtiments et des matériaux doit être repensée. L’optimisation des ressources passe par :
Mais ces évolutions ont un impact direct sur la raideur dynamique des matériaux, et donc sur leur performance acoustique. Concilier allègement des structures et isolation efficace est désormais un enjeu clé pour l’avenir de la construction.
A bientôt pour un nouvel article sur l’acoustique ♣